Le titulaire d’un droit de préemption ne peut pas revenir sur sa décision de renoncer à préempter

Le droit de préemption commercial donne à une commune la possibilité de se porter acquéreur prioritaire de biens commerciaux mis en vente (essentiellement fonds de commerce ou droit au bail commercial) lorsqu'ils sont situés dans un périmètre de sauvegarde du commerce et de l'artisanat de proximité (article L. 214‑1 du code de l'urbanisme). avocat spécialiste
Le respect de ce droit de préemption implique pour le cédant (sous peine de nullité de la vente), de procéder à une déclaration préalable en mairie, précisant le prix, l'activité de l'acquéreur pressenti, et les conditions principales de la mutation.
Dans les deux mois du dépôt en mairie de cette déclaration de cession, la commune peut exercer ou renoncer à faire usage de son droit de préemption.


Une décision du Conseil d'Etat du 27 juillet 2015 (req n° 374646) se prononce sur la possibilité pour une commune de revenir sur sa décision de renoncer à préempter un droit au bail. avocat expert préemption
En l'espèce, suite à la déclaration de cession d'un droit au bail par un commerçant, la commune a renoncé à exercer son droit de préemption. Puis, elle a souhaité revenir sur cette renonciation et a finalement décidé de préempter le droit au bail concerné.
Le cessionnaire (candidat à l'acquisition du droit au bail) a alors contesté en justice cette décision de préemption. La cour administrative d'appel de Versailles lui a donné raison et a annulé la décision de préemption comme étant illégale du fait de l'intervention préalable d'une renonciation au droit de préemption. La commune a formé un pourvoi en cassation devant le conseil d'Etat qui a validé l'annulation de la décision de préemption :

► Lorsqu'il a décidé de renoncer à exercer son droit de préemption, le titulaire ne peut plus revenir sur sa décision

« Lorsqu'il a décidé de renoncer à exercer le droit de préemption, que ce soit par l'effet de l'expiration du délai de deux mois, le cas échéant prorogé, ou par une décision explicite prise avant l'expiration de ce délai, il se trouve dessaisi et ne peut, par la suite, retirer cette décision ni, par voie de conséquence, légalement exercer son droit de préemption ». avocat spécialisé
Il en résulte que la commune ne pouvait pas prendre la décision de préempter après avoir renoncé à l'exercice de son droit de préemption.
Le Conseil d'Etat a en effet estimé que la décision de renonciation précédemment notifiée était définitive.


Cette solution n'est pas surprenante et le Conseil d'Etat l'a déjà appliquée aux décisions des communes de renoncer à exercer leur droit de préemption urbain sur un immeuble en vente (Conseil d'Etat, 12 novembre 2009, Société COMILUX, req n°327451).
Dans son arrêt du 27 juillet 2015, le Conseil d'Etat a aussi précisé que la décision de renonciation était irrévocable, quand bien même elle n'aurait été matérialisée que par une simple mention portée sur le formulaire Cerfa de déclaration de cession du bail commercial en cause, et qu'elle n'aurait pas été signée par un agent communal disposant d'une délégation régulière : Gilles CAILLET avocat
« qu'en jugeant qu'il ressortait des pièces du dossier qui lui était soumis que la commune avait, par une décision du 20 mai 2010, prise sous la forme d'une mention portée sur le formulaire de déclaration préalable, expressément renoncé à exercer son droit de préemption sur cette cession, la cour a suffisamment motivé son arrêt et n'a pas commis d'erreur de droit ; avocat
Considérant, en deuxième lieu, que la cour n'a entaché son arrêt ni d'insuffisance de motivation ni d'erreur de droit en jugeant, sans dénaturer la portée de l'argumentation dont elle était saisie, que la commune ne pouvait utilement se prévaloir des circonstances que la lettre adressée le 1er juin 2010 par la commune [concernée] à la société [cédante], avec la décision de renonciation à préempter du 20 mai 2010, elle‑même matérialisée par une mention portée, sous la signature du premier adjoint au maire, sur le formulaire Cerfa de déclaration de cession d'un bail commercial, n'aurait pas été signée par un agent communal disposant d'une délégation régulière et aurait été adressée à la société [cédante] par courrier simple, et non par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception ; ». recours contester

La réponse du titulaire du droit de préemption doit donc être mûrement réfléchie.
Gilles CAILLET avocat défend et conseille le propriétaire qui reçoit une décision de préemption